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Prévenir les marées noires dans l’Océan Indien Occidental après la tragédie Mauricienne

La côte sud-est de l'île Maurice connaît actuellement la pire marée noire jamais enregistrée dans l'Océan Indien Occidental suite à l'échouement du "MV Wakashio" le 25 juillet. Le pays est en état d'urgence environnementale.

Cet incident fait partie d'une série d'accidents marins dans notre région, y compris un déversement de phosphate dans le sud de Madagascar en août 2009 et l'échouage massif de dauphins en 2008 suite à un sondage sismique sous-marin par Exxon Mobil dans le nord-ouest de Madagascar. Très clairement, les îles de l'Océan Indien Occidental, dont Madagascar, ne sont pas à l'abri de ces accidents.

Il n’y a pas de petite ni de grande marée noire. Par rapport à d'autres catastrophes similaires comme l’échouage du « Katina P » qui a déversé 16 000 tonnes de pétrole au large des côtes du Mozambique en 1992, les 1 200 tonnes déversés par le «MV Wakashio» à partir des récifs situés devant la Pointe d'Esny semblent moindres. Cependant, la marée noire mauricienne affecte durement les zones côtières alentours qui incluent des écosystèmes lagunaires et récifaux, mais aussi des mangroves, estuaires, herbiers marins, et des plages. Toute la région renferme plusieurs parcs, réserves naturelles, ainsi qu’un site Ramsar connu pour sa diversité corallienne. Bien que le mazout restant dans le bateau ait été pompé, les experts ont estimé que le pétrole déjà déversé altèrera ces écosystèmes pour les années, et même la décennie à venir. Les coûts de nettoyage des écosystèmes pourraient s’élever à plus de 50 millions de USD pour Maurice, mais les coûts du rétablissement à long terme coûteraient largement plus. Les impacts de ce déversement sur l’environnement marin, la santé humaine, le tourisme et les moyens de subsistance, seront très graves.

Cette catastrophe évitable met en relief l’importance capitale de l’économie bleue qui est cruciale pour garder à flot entre autres les domaines de la sécurité alimentaire et de l’emploi, surtout en cette période où les impacts de la pandémie du Covid-19 leur ont déjà coûtés environ 10% du PIB. Cette région est importante pour le tourisme, qui est le troisième pilier de l’économie mauricienne (24,3 % du PIB), tandis que la petite pêche, qui fait vivre les communautés locales, se trouve également fortement impactée.

Afin que de telles catastrophes soient évitées et bien gérées dans le futur, il est recommandé :
  • D’arriver à disposer d’un financement adéquat pour l’Organe de Lutte contre les Évènements de Pollution (OLEP), rattaché au Ministère de l’Environnement et du Développement Durable de Madagascar. Les cotisations que les pays doivent verser pour que l’OLEP travaille correctement ne sont pas honorés. Pourtant, c’est l’organe de coordination sous régionale dans la lutte contre la pollution maritime.
  • D’alléger la procédure entre les pays de l’Océan Indien pour que l’intervention régionale contre les marées noires soit plus rapide. En effet, le Centre Régional de Coordination des Opérations (CRCO) dont la principale fonction est de coordonner des actions conjointes en mer est basé aux Seychelles. Cet organe doit d’abord passer par le Ministère des Affaires Etrangères Malagasy pour que l’envoi des matériels, tels que absorbants, puisse se faire par l’OLEP à partir de ses centres de stockage à Madagascar.
  • De renouveler les matériels de lutte contre les pollutions marines, car les matériels actuels datent de plus d’une décennie. Il est à noter que les absorbants sont à usage unique, et les pays utilisateurs, en cas de déversement, doivent remplacer rapidement les matériels utilisés, selon la Convention sur les Fonds Internationaux d'Indemnisation pour les dommages dus à la Pollution par les hydrocarbures (FIPOL).
  • D’établir un accord contraignant de planification spatiale régionale pour l’utilisation de l’espace marin de l’Océan Indien occidental. Il est important de baser un tel accord sur des données scientifiquement fiables, dont un Atlas maritime pour appuyer toutes les décisions politiques et de gouvernance liées à la gestion des côtes et espaces océaniques. Le Centre Régional de Fusion d’Informations Maritimes (CRFIM), basé à Madagascar (ainsi que sa branche nationale), est déjà pleinement opérationnel, et a pour responsabilité d’échanger et partager des informations maritimes et d’alerter le CRCO aux Seychelles de toute activité anormale en mer. Il faut maintenant une volonté politique appropriée pour que ces organes puissent travailler effectivement et partager de manière transparente les informations qu’ils collectent. Ceci devrait enfin mener à une collaboration plus ouverte avec les autres types d’acteurs (partenaires, société civile, autres gouvernements même hors de la région, etc.).